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croisade contre les albigeois.

Dieu, tu n’es pas droiturier, puisque tu souffres la mort du comte et notre perte : bien est fou qui te soutient et se fait ton homme, quand le comte, qui était juste et soutenait la bonne cause, [8465] est mort d’un coup de pierre, comme un mécréant. Et puisque tu fais périr même les tiens, jamais plus en cette terre nous n’aurons affaire. » Ils portent alors le comte aux clercs lisants, et le cardinal, l’abbé, l’évêque Folquet, [8470] le reçurent dolents avec croix et encensoirs.

Cependant à Toulouse entra un messager qui conta les nouvelles : telle est l’allégresse que par toute la ville on court aux moûtiers, on allume les cierges sur les chandeliers, [8475] on pousse des cris de joie[1], car Dieu est miséricordieux, car Parage resplendit et désormais est sûr du triomphe, tandis que le comte, qui était méchant et homicide, est mort sans avoir fait pénitence, en punition de sa cruauté. Mais les cors et les trompes et la joie générale, [8480] les carillons, les volées, les sonneries des cloches, les tambours, les timbres, les menus clairons, font retentir la ville et le sol pavé. Alors par toutes les routes on lève le siége qui était outre l’eau et occupait la grève[2], [8485] mais ils abandonnèrent les troupeaux (?) et les bêtes de somme, les pavillons, les tentes, les harnais et l’argent ; et les

  1. Il est possible que l’expression « cridar » ou « escridar la joia » (vv. 3819, 3928, 7669-70) ait quelque chose de spécial ; elle indique peut-être un cri particulier usité dans des circonstances heureuses.
  2. Selon la réd. en pr. (voy. t. I, p. 343 n.), le siége aurait été levé de ce côté par les croisés à la suite d’une attaque heureuse des Toulousains.