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croisade contre les albigeois.

de quoi lui et Dragonet ont conclu un accord [1]. Puis le comte manda à l’évêque de Viviers (car il s’était brouillé avec Adémar) de lui envoyer sans bruit des bateaux par le Rhône[2]. Puis ils passèrent sur l’autre

    sa rencontre en ce lieu avec le cardinal légat, circonstances dont la chanson ne dit rien. C’est sans doute bien peu après la prise de la Bastide que Simon arriva à Pont-Saint-Esprit. Son séjour en cette ville est daté par un acte passé le 14 juillet 1217 « in exercitu Domini, juxta Portum Sancti Saturnini » (Molinier, Catal. n° 145). C’est donc entre Vauvert ou Bernis et le Pont-Saint-Esprit qu’il faut chercher notre Bastide, ce qui conduit à l’identifier soit avec la Bastide d’Engras, cant. de Lussan, arr. d’Uzès, soit avec la Bastide d’Orgnols, com. de Goudargues, cant. du Pont-Saint-Esprit. Ces deux localités, sur lesquelles on possède des mentions anciennes (voy. G. Durand, Dict. topogr. du Gard), sont situées à 13 kil. l’une de l’autre, sur une même ligne, la première au sud, la seconde au nord.

  1. L’enchaînement des faits n’est pas très-facile à saisir. Il ne semble pas cependant que le texte offre ici une lacune, et il est probable que le petit développement que contient à cet endroit la réd. en pr. (voy. t. I, note sur les vers 5684-5) a pour objet de donner plus de clarté au récit : le fait est qu’après s’être emparé de la Bastide, le comte de Montfort prit et détruisit « turrem Draconeti fortissimam super ripam Rhodani sitam. » P. de V.-C. p. 109 a. Il est fâcheux que l’histoire ne nous dise pas sur quelle rive. A priori on serait porté à placer la tour en question à Mondragon, sur la rive gauche, mais la suite, tant chez P. de V.-C. que dans le poëme, montre que Simon de Montfort n’avait pas encore passé le Rhône. Il faut croire qu’après avoir subi cet échec, Dragonet, que nous avons vu plus haut au nombre des partisans du comte de Toulouse (v. 3859, 3870, 4400, 4702), crut de son intérêt de traiter avec Simon, et c’est peut-être là ce qu’aura voulu dire le poëte au v. 5685. Mais il reste une difficulté. Nous avons vu ci-dessus (v. 4954) Dragonet prêter ses bons offices au chef de la croisade en une circonstance difficile ; il est donc malaisé de s’expliquer la destruction de son château telle que la rapporte P. de V.-C.
  2. La brouille de Simon avec Adémar de Poitiers (sur lequel voy. p. 206, n. 1) et les circonstances du passage du Rhône nous