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croisade contre les albigeois.

donjon, ayant remarqué leur présence, enfermèrent du feu, du soufre et de l’étoupe dans un drap, [4500] et les descendirent avec une chaîne le long du mur. Et lorsque le soufre fut enflammé et liquéfié, l’odeur et la flamme ont tellement suffoqué les mineurs, qu’aucun d’eux ne put y rester et n’y resta. Alors ils se défendent avec les pierriers [4505], brisant et tranchant barrières et palissades. Sur la haute tour, au-dessus des créneaux, le lion[1] s’est pris à lutter avec la flamme, de telle sorte que peu s’en est fallu qu’il ne fût rompu. Et le tourrier crie : « Montfort nous a perdus, [4510] mais ce n’est point sa faute puisqu’il ne peut nous entendre[2], car le vaillant jeune comte nous a tous surpris. » Et il montra les serviettes et la bouteille qui luit, pour signifier que leur pain est mangé et leur vin bu. [4515] Le comte de Montfort, apercevant leurs signaux, s’assit à terre, plein de dépit et de fureur. À haute voix il s’écrie, plein de colère : « Chevaliers, aux armes ! » et il fut si bien obéi que par le camp s’élève le cri et la rumeur, [4520] qu’aucun homme valide, jeune ou chenu, ne resta en arrière. Tous s’arment à la fois et montent à cheval. Les trompes et les clairons résonnent, et ils montent au Puy des Pendus[3]. « Seigneurs, » dit le

  1. L’enseigne de Simon, qui portait un lion. Il faut supposer que les assiégeants avaient réussi à lancer du feu jusqu’au sommet de la tour. C’est ainsi qu’a entendu la rédaction en prose.
  2. Fort douteux, la fin du v. 4510 étant corrompue.
  3. Sans doute la colline de Margailler, au nord-ouest de Beaucaire, qui aura reçu ce nom pour avoir été un lieu réservé aux exécutions capitales. La carte du cours du Rhône levée par les soins de l’administration des ponts-et-chaussées (1/10,000), et exécutée pour cette partie en 1872-3, lui donne le nom de « Haute