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croisade contre les albigeois.

[4365] car le vaillant jeune comte a dressé les pierriers pour attaquer le donjon et le battre de toutes parts, pour ruiner les abris et les murs crénelés. Raoul du Gua parla ainsi : « Comte, je vous dirai ce qu’il faut faire : L’ost entière sera réduite à l’extrémité si vous leur interdisez le Rhône. » [4370] Le jeune comte dit : « R. Gaucelm, ordonnez qu’on défende l’eau avec tous les bateaux armés. — Sire, » dit Albeta[1], « la flottille est passée, et nous tenons les passes[2] gardées et défendues ; d’ici à Arles nous les avons toutes fermées. [4375] Sous le château, là où est le quai, sont ceux de Valabrègue avec les bateaux légers, de sorte que personne n’y vienne abreuver qu’il ne s’en retourne frappé. » — Tandis que le comte se consulte avec ses amis privés, le puissant comte de Montfort a mandé les charpentiers, [4380] tous ceux du pays, et ceux de ses terres, et sur la belle place, entre les murs et les fossés, il bâtit un château et une chatte bien ouvrés et munis, et garnis de fer, de bois et de cuir. Nuit et jour ils furent bien gardés. [4385] Par devant tout auprès, il y eut une catapulte qui tout le jour tirait sur le portail de la ville, aux créneaux carrés, brisant les grandes pierres de taille. — Au dedans et au dehors la rumeur s’élève que les puis-

  1. Albeta figure en 1226 dans l’énumération des nobles tarasconais qui traitèrent avec le comte de Provence au sujet de divers droits (Archives de Tarascon, Livre rouge ; cf. Papon, Hist. de Prov. II, pr. n° XLV).
  2. Il s’agit, je pense, des passes formées par les îles du Rhône, entre Beaucaire et Arles, cf. ci-dessus v. 3769. On pouvait les intercepter avec des chaînes, comme on le voit par la chronique de Bertran Boysset, à l’année 1411.