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croisade contre les albigeois.

fait entendre le bruit des avant-postes qu’on place et des trompes qui sonnent, [4200] car au dedans comme au dehors on est acharné et ardent à pousser la guerre.

CLXI.

À pousser la guerre ils sont tellement animés que toute la nuit ils demeurèrent prêts, les chevaux sellés, de façon qu’aucune des deux armées ne pût surprendre l’autre. [4205] À l’aube du jour, lorsque le temps s’éclaircit, des deux côtés ils ont revêtu les hauberts et les heaumes au cercle d’or bruni ; des écus et des lances tout le camp resplandit. Le comte prit la parole, et parla assez haut pour être entendu de tous : [4210] « Barons, nous devons être valeureux et avisés, car la chrétienté nous a choisis comme l’élite de tous ; et après un tel choix, si vous me laissez perdre la terre, vous en serez tous honnis. Tout ce que j’ai gagné et conquis avec vous [4215] je vous l’ai largement donné et distribué, et personne ne peut dire que je lui aie fait tort. Eh bien ! après que je vous ai tant donné et tant fait profiter, si je perdais la terre, vous m’auriez fait pauvre service. Du château de Beaucaire j’ai été dépossédé, [4220] et si je n’en prends vengeance, mes exploits sont minces. Puisque j’en avais été saisi par l’archevêque d’Arles[1], j’ai bien raison d’être dépité quand on me l’enlève. Et dedans sont

  1. L’acte existe et a été imprimé (Molinier, Catal. n° 95). Il est daté de Beaucaire, 30 janv. 1215 (n. s.).