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croisade contre les albigeois.

légiste de la chrétienté ; il est chevalier et homme de haute naissance. Ce que tous les autres savent ne vaut pas, au prix de lui, un dé : aussi s’arracheraient-ils les yeux plutôt que de souffler mot. [1330] Tel est celui qui soutient le comte en homme d’expérience[1]. L’abbé de Cîteaux s’est levé : « Seigneurs, » leur dit-il, « sachez qu’il est vérité que le comte de Toulouse m’a fort honoré, abandonné sa terre, dont je lui sais bon gré ; [1335] et je vous prie de l’avoir pour recommandé. » Alors furent dépliées les lettres scellées de Rome qu’on avait apportées au comte de Toulouse. Que servirait d’allonger le récit ? Ils ont tant demandé qu’à la fin[2] le comte Raimon dit [1340] qu’il ne pourrait payer tout cela avec tout son comté. Il mit le pied à l’étrier, courroucé et attristé, et s’en retourna à Toulouse, en son pays, au plus vite, grand train[3].

  1. La traduction exacte du texte, tel qu’il est imprimé, serait : « Tel est celui qui soutient le comte en homme d’expérience, car il s’arracherait l’œil plutôt que de souffler mot, » phrase dont la conclusion est assez inattendue. On obtient le sens auquel je me suis arrêté en transposant les vers 1329 et 1330 (dès lors traicheran se rapporte tout naturellement à Tuit li autre, et la note du v. 1330 devient inutile), et en lisant au v. 1330, avec Fauriel (qui du reste fait ici un contre-sens), quei (que i) au lieu de quel que semble plutôt porter le ms.
  2. J’entends au v. 1339 er’, à l’imparfait, « quand cela était (= fut) fini » ; mais j’ai dans le texte écrit et ponctué comme si er était au futur, ce qui peut aussi se défendre : « Le comte R. dit : Quand cela sera terminé (= quand il aura consenti à tout ce qu’on lui demande)... »
  3. P. de V.-C. ne dit rien de ce concile dont il est difficile de se faire une idée nette à l’aide de G. de Tudèle. Mais des rensei-