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croisade contre les albigeois.

Maintenant je n’y sais rien de plus sinon de faire un accord, si nous pouvons l’obtenir, avec les barons de France ; [635] car, selon Dieu et selon mon opinion, en une nouvelle bataille à l’écu et à la lance vous ne pourriez guère mettre votre espérance. Si grande est leur ost que je me prends à craindre qu’à la fin vous ne puissiez tenir jusqu’au bout. [640] Vous avez en la ville, qui est forte, grande confiance : s’il n’y avait pas tant de monde et un si grand excès de femmes et d’enfants, selon mon opinion, vous pourriez bien avoir encore quelque sujet de vous réjouir. Je suis pour vous si affligé, et j’éprouve une telle compassion, [645] pour l’amour que je vous porte et parce que je vous connais, qu’il n’est rien que je ne fisse pour vous, s’il n’y avait grand déshonneur. » Le vicomte [lui répond[1]] qu’il fait grand cas de son accord [projeté] tant pour lui-même que pour les barons qu’il a avec lui[2].

XXIX.

« Sire, » dit le vicomte, « ainsi comme il vous plaira [650] vous pouvez faire de la ville et de tout ce qui s’y trouve, car nous sommes tous vos hommes, et l’étions déjà, comme aussi du roi votre père qui beaucoup nous aima[3]. » À ces mots il

  1. Voir au t. I la note sur le v. 647.
  2. Le rapport du v. 648 avec le précédent est rendu clair par le v. 659.
  3. Le vicomte Rogier II, père de Raimon Rogier, avait en effet prêté serment au roi d’Aragon à diverses reprises (Vaissète, III, 19, 54, 68). C’est pourquoi, aussitôt mis en possession des terres du vicomte de Béziers, Simon de Montfort fit tous ses efforts pour