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croisade contre les albigeois.

XXII.

Les ribauds et leur roi pensèrent jouir de l’avoir qu’ils avaient pris, et en être riches à tout jamais. Quand on le leur eut enlevé, ils s’écrient tous d’une voix : [510] « Au feu, au feu ! » les misérables truands punais[1]. Alors ils apportent des torches aussi grandes qu’un.....[2] La cité s’enflamme et l’effroi se répand. La ville tout entière brûle, en long et en travers. Ainsi Raoul de Cambrai brûla et ruina [515] une riche cité qui est près de Douai[3]. Ensuite sa mère Alazais l’en blâma fort, et pour cela il la pensa frapper au visage. Quant ils sentirent le feu, chacun se retira en arrière ; alors brûlent les maisons et toutes les grandes salles. [520] Bien des casaques y brûlent, bien des heaumes et des gambaisons[4] qui furent faits à Chartres, à Blaye ou à Edesse, et nombre de bonnes robes qu’il fallut laisser. Et tout le moûtier brûla, qu’avait fait maître Gervais ; par le milieu il se fendit par l’effet de la chaleur, [525] et deux pans en tombèrent.

  1. Ceci est éclairci par les vers 528-30. Les ribauds voulaient empêcher les croisés de jouir de ce qu’ils regardaient déjà comme leur bien.
  2. Mot à mot « comme un rayon », mais un rayon de quoi ?
  3. Le moûtier d’Origny, dans la chanson de Raoul de Cambrai, laquelle paraît avoir été répandue dans le Midi. Bertran de Born en rappelle un épisode dans sa pièce « Pus li baron... » (Raynouard, Choix, IV, 170), et Folquet de Romans fait une allusion, du reste assez peu claire, au même poëme, dans « Ma bella dompna per vos dei esser gais » (Archiv de Herrig, XXXIII, 309 a).
  4. Vêtement rembourré.