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croisade contre les albigeois.

Ceux qui sortirent de la ville avec lui sauvèrent leur vie, et ceux qui restèrent le payèrent cher. [415] Aussitôt qu’il le put, sans plus tarder, l’évêque a fait son récit à l’abbé de Cîteaux ainsi qu’aux autres barons qui l’ont bien écouté, qui les tiennent (les habitants) pour gent sotte et insensée. Ils savent bien que la mort les attend, [420] et le tourment et la peine.

XVIII.

Ce fut à la fête de la Madeleine[1] que l’abbé de Cîteaux amena sa grande ost ; tout à l’entour de Béziers elle campe par la plaine. Maintenant je crois que pour les habitants se préparent les tourments et la peine, [425] car jamais l’ost de Ménélas, à qui Paris enleva Hélène, ne dressa des tentes aussi nombreuses au port, sous Mycènes, ni autant de riches pavillons, la nuit, en plein air, que l’ost des Français. À part le comte de Brienne[2], il n’y eut baron en France qui n’y fit sa quarantaine[3] . [430] Pour les barons de la ville ce fut alors une mauvaise étrenne lorsqu’on leur conseilla...[4] Ils passèrent toute la semaine à escarmoucher. Or entendez ce que faisaient ces vilains qui sont plus fous et simples que la baleine : [435] avec leurs bannières blanches de grosse toile ils vont courant par l’ost criant à haute voix ; ils croient les épouvanter, comme on chasse des oiseaux d’un champ d’avoine, en criant,

  1. 22 juillet.
  2. Jean de Brienne, qui à ce moment se préparait à occuper le trône de Jérusalem ; voy. Du Cange, Familles d’Outremer, p. 32-4.
  3. C.-à-d. qui n’y servit les quarante jours imposés pour gagner l’indulgence attachée à cette expédition.
  4. Passage corrompu, voy. Romania, IV, 271.