Page:La Chanson de la croisade contre les Albigeois, 1875, tome 2.djvu/125

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
cxiij
introduction, § xii.

l’Albigeois. Je trouve en effet ei, farei dans une charte passée en 1248 à Gaillac[1], et, un peu plus tard, en 1311 et 1313, dans des chartes originaires du même arrondissement[2], iei, gardariei, mostrariei, seriei, où de plus on remarque le développement d’un i parasite[3].

Ces faits, toutefois, ne prouvent pas absolument que le ms. du poème ait été exécuté en Albigeois, parce qu’ils peuvent venir d’un ms. antérieur.

Examinons maintenant quelques autres faits qui remontent certainement à l’auteur.

J’ai indiqué au vocabulaire plusieurs exemples de senhs, sens (sanctus), au cas régime du sing. sent, qui se trouvent en rimes. Sants (sanctos) se trouve aussi en rime (6091) ; mais il est probable que la forme sens, sent, de beaucoup la moins généralement usitée, représente la prononciation habituelle de l’auteur. Il est tout naturel qu’il ait connu la forme avec a, encore qu’elle ne fût pas la sienne propre, mais il l’est moins qu’il ait pu connaître la forme avec e, s’il était d’un pays où elle n’existait pas. Si donc sens, sent, appartient proprement à la langue de l’auteur, nous avons là un indice d’origine qui n’est pas sans valeur. Cette forme se rencontre dans les chartes de Saint-Pierre de

  1. Rossignol, Monographies communales du Tarn, II, 391.
  2. Bibliothèque de l’École des chartes, 2, III, 250, et XXX, 579.
  3. On peut mentionner ici la réduction qu’on remarque dans les prétérits dont la finale, au lieu d’être ei, est è (ou é ?) : ainsi laiche 4645, rende 3235. Il faudrait trouver ces mots en rime pour déterminer le son (ouvert ou fermé) de la finale, mais il n’y a pas, dans tout le poème, de rimes où ils aient pu prendre place. Dans mon édition j’ai corrigé laiche en laiche[i], mais la réduction de -ei à -e est aussi naturelle pour le prétérit que pour le futur.