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196 Esr1ENNE DE LA BOÉTIE fenteurs; ainii le penfement du bien receu fert encore de remede neceffaire au mal qui furuient, au moins à celuy qui ne fuit pas la memoire du bien paffé, &. ne prent pas plaifir d’accufer entierement de tout la fortune: de quoy nous nous deuons bien garder, & 5 de vouloir calomnieufement blafmer la vie d’entre nous hommes pour quelque tache de malheur, vne pofïible fans plus, qui fe trouue en elle, comme en vn liure, tout le demeurant eftant net & entier. Car il te fouuient bien de m’auoir fouuent ouy dire zo que les changemens de fortune ne peuuent de guieres esbranfler noftre vie, ny auec fes hazards elle ne D’<¤ù luy fçauroit faire prendre grand faut. Mais toute la de end la _ Ãzicité. felicité ne depend que d’vne bonne & droite refolu- tion, parfaite & accomplie en vne habitude ferme & i5 alïeuree. Et encores Bil faut, à la façon de la plus part des hommes, fe gouuerner par ce qui eft hors de nous, & ûil eft befoin de conter ce que nous tenons de la fortune, & faire le peuple mefme iuge de noltre bon heur, ne prens pas garde, ie te prie, aux larmes 20 &plaintes de ceux qui te vifitent maintenant, lefquels «[Qu’]¢m_m par vne mauuaife couftume on voit faire ainii, ains dozü ouml . , . enr/îiure combien ceux la mefmes admirent ton bon heur, à [,,,112:5,% raifon des enfants que tu as, & de la grandeur de ‘°’J"“’"°"‘ noftre maifon, &de ta vie. Et, fans doute, ce feroit vne 25 chofe merueilleufement defraifonnable qu’il n’y aye celuy de ceux qui te voyent, qui ne print volontiers la condition en quoy tu es, encores auec la charge de l’inconuenient dont toy & moy nous deuillons, & que tu fuffes feule à t’en plaindre & mefcontenter. Et 30 n’y a pas de raifon que le mal mefme qui te pique ne te