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ſ’entrayment, il eſt lors du ranc des choſes qui ſont vnes & conformes ; ſi c’eſt de gents qui ſont mariez pour le bien, ou pour auoir enfants, il eſt de parties 35 aſſemblees & vnies ; ſi c’eſt comme d’aucuns qu’il y en a qui ne couchent point enſemble, ce mariage eſt fait de pieces diuerſes & ſeparees : car ceux-là, à le bien prendre, demeurent bien l’vn auec l’autre, mais non pas qu’ils viuent enſemble.

40 Comme les Medecins diſent que des liqueurs la XXXVI. meſlange ſ’en faict vniuerſelle & en tout ; ainſi il eſt meſtier qu’entre le mary & femme leurs corps, leurs biens, leurs amis, leurs domeſtiques, ſoient meſlez & confus l’vn parmy l’autre. Car le Policeur de Rome Toutes choſes eſtre communes entre le mary & la fame. 45 deffendit que le mary & la femme ne ſ’entredonnaſſent ny receuſſent rien l’vn de l’autre, non pas qu’il voulſiſt que l’vn ne fuſt participant de rien que l’autre euſt, mais à fin qu’ils eſtimaſſent tout leur auoir eſtre commun.

50 En vne ville de Libye, qu’on appelle Lepte, la XXXVII. couſtume du païs eſt que l’eſpouſee, le iour d’apres ſes noces, enuoye à la mere de ſon mary demander Demande & refus d’vn pot. vn pot ; & elle ne le baille point, ains dit n’en auoir pas, à fin que la mariee, des le premier iour, ayant 55 appris la rigueur maternelle de ſa belle mere, ne ſe deſpite point ny ſe faſche, ſ’il luy ſuruient apres quelque choſe de dur & faſcheux. Il faut donc que la femme, ſçachant cela, remedie à l’occaſion d’où pourroit le meſcontentement de ſa belle mere 60 prouenir. Or n’y a il autre occaſion que la ialouſie de la mere contre elle, à force de grande amitié qu’elle porte à ſon fils ; & le remede contre ce mal, c’eſt que