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L’ART PRIAPIQUE.

Redonner le mouchoir aux filles du bon ton,
Et laisser la province enfiler Margoton.
Il faut de vos talens faire un meilleur usage :
Ne descendons jamais en un si bas étage,
Et laissons la crapule aux ribauds du Pont-Neuf.
Mais en voulant toujours du fringant et du neuf,
Vos pines à baiser se montrant trop rétives,
Dans vos chausses longtems peuvent rester oisives.
Sachez que la nature est plus belle que l’art,
Qu’un teint frais est plus beau qu’un teint chargé de fard,
Et que dans l’art heureux et d’aimer et de plaire,
Une reine souvent vaut moins qu’une bergère.
Dans vos courses d’amour prenez quelque repos :
Point trop de changement ni de plaisirs nouveaux.
Gardez que votre pine, à courir trop hâtée,
Ne soit par un poulain en son chemin heurtée.
De fillettes partout il est un choix heureux,
De certaines fuyez l’abord contagieux.
La plus aimable fille étant chaude-pissée,
Doit vous glacer le cœur, le vit et la pensée.
Ah ! qu’ils faisaient l’amour platement autrefois
Ces chevaliers errants, ces paladins courtois !
Filant à leurs beautés une tendresse pure,
Ils pensaient que les foutre était leur faire injure.
Pinus sut le premier, dans ces siècles grossiers,
Cocufier plusieurs de ces preux chevaliers.