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L’ÉTOURDI.


nonçait d’un ton de voix ſi timide & accompagné de regards ſi modeſtes, enfin d’un air ſi pur, qu’il n’y avait pas moyen de ſe méfier que cela ne fût pas ſincere. Ce n’était preſque que de vieux militaires qui fréquentaient chez ſa mere, & qui, chacun en particulier, aurait été fort aiſe de recrépir ſa fortune avec la ſienne. Elle était une aſſez riche héritiere ; & ſe confiant qu’elle était réellement fille à n’épouſer que la bonne amitié, ils la demanderent au pere qui lui laiſſait la liberté du choix. Elle ne fut pas ſi ſotte que de ſe déterminer pour des pareils demandeurs qui auraient dû plutôt poſtuler les invalides que de rechercher une jeune perſonne en mariage. Sans démentir jamais ſon affectation, ce n’était ni l’âge, ni les infirmités qu’elle alléguait, elle trouvait aiſément d’autres motifs d’excluſion. Elle ſe réſervait à M. de Nephes qui avait tout l’air de lui donner plus qu’elle ne feignait vouloir. Elle attendait impatiemment qu’il ſe déclarât, il le fit, & fut accepté.