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L’ARCHITECTURE DE LA RENAISSANCE.

et d’Allemagne, voire même d’Angleterre, ainsi que le démontre la grande église de Batalha, en Portugal, vraie copie de la cathédrale d’York, elle avait bien adopté les formes gothiques ; mais, à mesure que la conquête avançait, que les royaumes arabes disparaissaient les uns après les autres, ses tendances à la richesse, son amour du grandiose et du merveilleux lui firent prendre goût au style mauresque, en espagnol estilo mudejar. Et le résultat de cette évolution fut, au xve siècle, l’éclosion d’une architecture qui se fait remarquer par sa facilité à admettre des éléments puisés à deux sources différentes.

Le style gothique, ainsi rajeuni en quelque sorte, devait acquérir une force nouvelle, et l’on ne saurait s’étonner des résistances plus grandes opposées par l’Espagne au mouvement de la Renaissance. Cependant, il ne faut pas exagérer les choses, et chacun peut voir, à Tolède, la façade de l’ancien hôpital de Santa-Cruz, construite et décorée, de 1504 à 1516, sous la direction d’un architecte né au midi des Pyrénées, mais Flamand d’origine, Henri de Egaz. Les réminiscences de l’antiquité s’y mêlent à l’art du moyen âge, et tout fait prévoir que la place, vigoureusement attaquée, sera obligée de se rendre un jour.

Juan de Arphe, célèbre orfèvre du xvie siècle, auteur d’un ouvrage sur les arts de son temps, nous a conservé les noms de deux architectes, Diégo Siloé et Alonzo de Covarrubias, qui également, paraît-il, s’engagèrent de bonne heure dans la voie déjà ouverte. Mais les meilleures dispositions étaient souvent entravées, et, sous peine de se voir mis de côté, il fallait