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J’ai pu continuer mon service, mais l’air piteux, voûtée, la bouche entrouverte, les yeux abêtis, à cause des lancinements intolérables.

La directrice, absolument charmante, m’a interpellée :

— Eh bien, Rose, à la bonne heure !… vous avez pris le courant du premier coup : restez ainsi et tout ira bien.

Mme Paulin, essuyant plus que jamais son nez avec son bras nu, a tourné autour de moi, du matin au soir, comme une mère poule inquiète.

À l’issue de ma troisième journée, au milieu de la petite classe, comme je me recueillais dans ce silence avide propre aux locaux administratifs et qui propage en sonorité creuse le moindre heurt du pied contre un meuble, — ce fait stupéfiant m’est apparu nettement : de tout le personnel d’une école maternelle, c’est la femme de service qui assume le rôle le plus indispensable ; une maîtresse, la directrice même peut s’absenter sans trop d’inconvénient, mais on ne saurait se passer un seul jour des deux manœuvres : la cantinière et la préposée à la propreté. Cette dernière, — la véritable femme de service, — s’honore de rapports exclusifs avec les enfants ; dix fois, vingt fois par jour, on la requiert dans chaque classe pour un office où personne ne peut la remplacer. Je sais même que, par un léger accroc au règlement, on lui confie la surveillance aux heures extrêmes où les enfants sont peu nombreux dans le préau : de huit heures