Page:Léon Frapié - La maternelle, 1904.djvu/228

Cette page a été validée par deux contributeurs.

fait aussi cette découverte : lorsque je viens chercher ma portion le soir à la gargote, le sarcasme boueux des consommateurs s’attaque surtout à mes yeux. Et j’ai peur… j’ai peur bientôt de tout comprendre !

S’il est vrai que le fait de se sentir persécutée est un signe de détraquement, gare à moi !

Le rire perpétuel d’Irma Guépin m’est devenu insupportable. J’ai maintenant cette idiote faiblesse de rougir devant un rire « de face » et qui insiste. Mme Paulin s’en est aperçue et sait m’épargner. Mais Irma, au contraire, abuse.

J’ai envie de changer de « fille », comme nous faisions quelquefois, au pensionnat. J’aimerais bien Julia Kasen.

Il suffit qu’une chose m’horripile pour qu’Irma s’y obstine :

— J’ai encore rencontré M. Libois et je lui ai dit encore qui que j’aimais le mieux à l’école. Il m’a demandé : « Tu sais faire les commissions ? Voyons : Va me chercher une boîte de chocolat chez l’épicier… Très bien, c’est pour toi. Mais, es-tu sûre que tu ferais bien toutes les commissions ? Es-tu sûre ? Tu sais porter une lettre à son adresse ?… » Oh ! comme il a ri dans mes yeux, en secouant la tête. Puis, il m’a prise comme ça par les deux coudes : ouf ! en l’air ! Il m’a embrassée sur les deux joues. Il est parti.

Pourquoi noter ces niaiseries ?

Mars. — Des travaux de raccommodage ont