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la maternelle

— Tu ne te tairas jamais ?

— Non, j’aime mieux brailler.

— Allons, que celui qui a fait du mal à Gillon vienne le consoler et l’embrasser… Non, non, pas Virginie Popelin, je sais que ce n’est pas elle…

Quand je suis dans la classe des tout petits, à les amuser avec les guignols, avec les constructions, à leur répéter les formules de la directrice, premières notions du bien et du mal, à les empêcher de s’égratigner, je trouve encore le moyen, à travers la cloison vitrée, de noter l’ordre des leçons de la normalienne. Je laisse passer sans attention le calcul, la géographie, la lecture, le dessin, l’écriture, les exercices manuels, mais les causeries de morale m’émeuvent toujours. La normalienne les répand dans la perfection ; un manuel lui fournit des canevas qu’elle développe d’abondance et selon la méthode. Je la vois, debout dans son bureau, sa voix sonne d’une sincérité pénétrante, son visage fin nuance et anime les propositions, son corps flexible situe les choses ; tous les élèves se penchent, obéissent à un rythme et, en un instant, une totale harmonie possède la classe.

« Écoutez bien comment le petit Gaston a été puni pour n’avoir pas obéi à sa maman… »

C’est la grande œuvre ! Le récit familier, c’est la source où rafraîchir et vivifier cette fragile humanité.

15 janvier. — Un fait est venu brusquement