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LA VIE DE JÉSUS

il y avait autour du lac nombre de villas de plaisance où les belles petites de Galilée menaient joyeuse vie ; or, notre gaillard de Jésus ne haïssait pas la fréquentation des jeunes et jolies pécheresses. Capharnaüm, Magdala et Tibériade étaient, au bord du lac, les villes les plus renommées en produits de ce genre. Enfin, les rivages de Génésareth se prêtaient admirablement à ses prédications. Le Christ n’avait qu’à monter sur une barque, et de là il débitait à la foule son boniment. En cas de danger, à la moindre apparition des sergents de ville du temps, il levait l’ancre et filait à grandes voiles sur la rive de vis-à-vis qui n’appartenait plus au territoire gouverné par Hérode Antipas.

Ce fut à Capharnaüm, ville d’eaux, qu’il fit sa première station ; mais il n’y demeura pas longtemps.

Quand il pensa que l’affaire de Cana était oubliée, il résolut de se signaler de nouveau, mais cette fois à Jérusalem même. C’était l’époque de la Pâque : les caravanes se formaient sur tous les points de la Galilée, et se mettaient en route pour la ville sainte. Jésus et ses cinq compagnons suivirent une de ces caravanes, en compagnie d’autres mendiants, dévôts et vagabonds.

Son premier soin, à son arrivée à Jérusalem, fut de se rendre au Temple. La foule y affluait. On ne pouvait mieux choisir un endroit pour être remarqué en cas d’un esclandre quelconque.

L’Oint avait son plan en tête.

Le Temple, en ce temps-là, était encombré de marchands d’objets destinés aux sacrifices. Dans les cours, les parvis, les avenues et jusque sous le péristyle, se trouvait réuni tout ce qu’exigeait le service des autels. De même qu’aux alentours de nos églises modernes, de même que dans les vestibules de nos cathédrales d’aujourd’hui, il y a, à l’usage des bigots, un vrai marché d’articles de piété ; de même, au temps de Jésus, les marchands offraient aux visiteurs du sanctuaire les victimes prescrites par la loi. De nos jours, c’est un assortiment complet de cierges, de médailles bénites, de scapulaires, d’agnus, de reliques, de chapelets, d’images avec oraisons jaculatoires au verso, de catéchismes, de menus riens indulgenciés, que des vendeurs alertes repassent aux fidèles naïfs ; autrefois, c’étaient des colombes destinées aux offrandes des pauvres, des troupeaux de bœufs et de brebis pour les offrandes des riches. On n’immolait pas, en effet, rien que l’agneau pascal ; les juifs, qui habitaient les villes lointaines et qui ne venaient à Jérusalem qu’une fois l’an, réservaient leurs dévotions pour la grande fête religioso-nationale : alors, on tenait toutes les promesses faites pendant les douze mois de l’année, on accomplissait d’un coup tous les vœux. Les choses n’ont pas changé, comme on voit.

Il suffit d’avoir assisté, par exemple, à Paris, à la neuvaine de sainte Geneviève du Panthéon, pour concevoir une juste idée du tumulte dans lequel se trouvaient, à la Pâque de Jérusalem, les parvis du Temple.