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LA VIE DE JÉSUS

Dieu le veuille, si mon cousin Baptiste a été décapité, c’est parce que mon Père, celui qui est au ciel, en avait décidé ainsi.

— Eh bien, il n’a pas été aimable pour son neveu, votre Père qui est au ciel !

— Les desseins du Très-Haut sont insondables.

Les apôtres n’étaient pas rassurés du tout. Ils demandèrent s’il ne serait pas prudent de se mettre à l’abri.

— Attendez, répondit Jésus ; il faut que je consulte l’horloge de mon destin.

Puis, ayant réfléchi un instant, il dit :

— Mon heure n’est pas encore venue. Déguerpissons.

On se rendit dans le premier port que l’on rencontra, et notre sainte bande fit voile vers le nord de la mer de Tibériade.

Ce fut à Bethsaïde, déjà célèbre par la pêche miraculeuse, que nos hommes débarquèrent. Ce village appartenait au territoire gouverné par Philippe et était, depuis l’année précédente, devenu une cité. Le tétrarque avait même changé son nom et l’avait appelé Julias, par courtisanerie envers la fille d’Auguste.

Autour de cette ville naissante s’étendaient de vastes solitudes, et des collines s’élevaient à l’orient, aussi désertes qu’aujourd’hui. C’est dans cette localité que le fils du pigeon avait compté trouver le calme.

Son espérance fut déçue.

En dépit du secret dont le grand rebouteur avait couvert son départ, quelques témoins, ayant vu la voile s’éloigner du bord, avertirent le peuple, qui suivit le long du rivage. Contrariée sans doute par les vents, la barque marchait avec lenteur ; elle fut devancée, et quand Jésus mit pied à terre, en compagnie de ses disciples, il se vit entouré par une foule aussi nombreuse que celles de Naïm et de Capharnaüm.

On était alors aux approches de la Pâque. Déjà les caravanes se formaient. Il y avait là une multitude de pèlerins, venus des plus lointaines contrées. Le père Zébédée, dès qu’il avait su la prochaine arrivée de ses deux fils et de leur chef, s’était mis en quatre pour chauffer le zèle des habitants.

— Vous allez le voir, ce Jésus, disait-il, à qui voulait l’entendre ; en voilà un qui est rudement fort ! Un jour que le temps n’était pas du tout à la pêche, — et je m’y connais, moi qui suis un vieux loup de mer, — il a fait prendre à mes fils du poisson à en remplir deux barques ! Cela tenait du prodige. Vous n’aurez qu’à lui demander des miracles ; il vous en exécutera des mille et des cent.

Aussi, quand l’Oint fut parmi les gens de Bethsaïde-Julias, reçut-il un accueil plus que sympathique.

— Rabbi, demanda la foule sur tous les tons, un miracle, un miracle !