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UN DIVORCE

des deux époux, soit par l’acte de naissance de leur premier-né. »

J’ajoute que le divorce existerait de plein droit par la stérilité du couple, ou dans ces cas de crime et d’infamie qui dépouillent un individu de tout droit moral et le mettent au ban de l’humanité.

— Et vous vous résignez à tous les malheurs, à tous les désordres qu’entraîne une union mal assortie ?

— Je ne m’y résigne pas, répliqua le vieillard avec une certaine sévérité. Je dis simplement que le divorce n’est pas, ne peut pas être le remède aux maux du mariage, puisqu’il en nie le principe et en méconnaît le but. Est-il donc si difficile de remonter à la cause du mal ? Le mariage, ce développement et ce renouvellement de l’être, cette fusion sublime d’unités éparses, que Dieu seul pouvait inventer, mystère insondable dans sa force et dans sa grandeur, nœud de la vie, comment les hommes l’abordent-ils ? Est-ce avec religion ? avec respect ? est-ce même avec prudence ? Quel est celui de leurs intérêts, parmi les plus secondaires, qu’ils sacrifient plus facilement ? Et de quoi se rient-ils avec autant de mépris ? De l’amour, que Dieu leur avait donné, les hommes ont fait la débauche. Eh bien ! que le malheur donc, le crime et la honte règnent dans le mariage, et bouleversent la société, jusqu’à ce qu’enfin on s’épouvante, et qu’ils renoncent à faire de l’acte le plus solennel et le plus grave l’enjeu de leurs orgueils et de leurs cupidités.

Il marchait à grands pas, le visage animé de rougeur sous ses cheveux blancs. Mathilde, silencieuse, méditait ces paroles. Dimitri, prenant dans sa main la main de sa fiancée :

— Et moi aussi, mon père, dit-il, je crois, je sens le mariage indestructible. Toutefois, la justice humaine doit