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UN DIVORCE

— Où vas-tu, Anna ? demanda madame Grandvaux à sa fille en la voyant avec son châle et son chapeau, et avec le petit Fritz, qui ne la quittait plus et s’attachait toujours à sa robe.

— Je vais leur parler, maman.

— À ton beau-frère ?… à M. Desfayes ? dit-elle en se reprenant, et à cette femme !

— Qu’importe ! si je puis ramener Fernand.

— Allez, chère fille, allez ! s’écria Camille. Dites tout ce qu’il faut, et rappelez-vous qu’elle sacrifierait tout pour lui.

— Oui, va ! dit Claire.

En embrassant sa sœur, elle fondit en larmes, et cela lui fit du bien.

Anna ne revint qu’à la nuit ; mais elle revint seule. M. Desfayes avait été inflexible.

Madame Fonjallaz, ou plutôt la nouvelle madame Desfayes, s’était plu d’abord à se montrer magnanime, et à prendre Anna sous sa protection ; mais celle-ci vit bientôt que ce n’était qu’un jeu, et que cette femme ne visait au fond qu’à irriter M. Desfayes ; quand Anna lui avait dit :

— Vous êtes mère, madame ; si on vous enlevait votre enfant ?

M. Desfayes est père aussi, je pense. Est-ce que Fernand ne serait pas son fils ? avait répondu l’insolente créature. Que voulez-vous ? Quand on veut garder ses enfants, on ne divorce pas.

Cependant, elle était venue conduire Anna jusqu’en dehors de l’appartement, et là, lui avait dit, d’un ton de confidence, que M. Desfayes était très-irrité, parce qu’il s’était aperçu qu’on avait prévenu l’enfant contre lui et contre sa femme ; pour elle, on avait beau être injuste, elle pardonnait tout et ne cherchait pas à se venger,