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UN DIVORCE

sur lui un regard pur et profond, quand il passa tout à coup la main sur son front et s’éloigna d’elle.

— Je suis fou ! c’est impossible à présent. Nous disons là des choses insensées, Claire. Nous n’avons plus le droit de nous réunir ; nous sommes à jamais séparés.

— Pourquoi ? pourquoi cela ? demanda-t-elle.

— La loi désormais nous le défend.

— C’est impossible ! dit la jeune femme en se levant stupéfaite et le regardant avec doute.

— Non, tu comprends : il faut savoir ce qu’on veut. La justice et la loi sont choses sérieuses et avec lesquelles on ne peut jouer.

— Ce sont elles, Ferdinand, oh ! ce sont elles qui jouent avec les choses sacrées. Ta loi et ta justice me font pitié quand elles osent toucher au mariage. Croient-elles donc l’avoir fait ? Quelle folie ! C’est Dieu !

Elle retomba sur le fauteuil, et une pâleur nouvelle envahit son visage.

— Tu te trompes, je t’assure ; oui, tu te trompes. Car enfin c’est tout simple, on leur dira : « Vous ne savez pas ce que vous faites ; nous sommes mariés, c’est une chose bien claire. Ne voyez-vous pas les enfants ? »

— Ma pauvre amie, je crois que tu as raison, mais nous vivons dans le monde, et ce sont les lois du monde. Nous les avons invoquées. Je te l’ai dit : C’est fini. Et maintenant, moi aussi, je le regrette… Oui, je le regrette profondément, répéta-t-il avec un soupir, en se laissant tomber sur un autre siége en face de Claire.

Ils restèrent ainsi dans le silence un moment. Claire, les yeux fixés devant elle, songeait. Lui, il la regardait, avec attendrissement d’abord, puis bientôt avec une attention d’un autre genre. Dans cette pose abattue, comme elle était pâle, maigre, flétrie ! Ce n’était plus, mais plus