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UN DIVORCE

gement à la chaste douceur de la belle petite le type régulier, mais dur et sensuel, de Ferdinand. Claire en devint comme hallucinée. C’était bien lui, tel qu’autrefois elle le voyait quand ils s’aimaient, quand elle le trouvait beau et le croyait bon.

Elle éprouva alors une impression si amère qu’elle fondit en larmes. Elle s’arracha de ce berceau pour aller à celui de Fernand ; il dormait aussi, mais dans une pose tourmentée, et le cœur gonflé de soupirs. Elle détendit et frotta doucement les petits membres crispés de l’enfant, l’établit dans une position plus commode, et changea son oppression en doux rêves par de longs baisers. Celui-là rappelait le visage de sa mère, et surtout il était sien par l’âme et par des souffrances communes.

Mais, âme ou corps, chair ou pensée, ils étaient l’un et l’autre, elle et Ferdinand, dans ces deux enfants, et la petite fille appartenait à sa mère comme Fernand à son père par le plus étroit des liens de la vie.

Tout ce que le mariage renferme en soi de redoutable et de sacré, la jeune mère le sentit à ce moment, et le rêve qu’elle caressait tout à l’heure lui inspira des remords. Ne venait-elle pas d’être adultère dans sa pensée ? Le sang lui afflua au visage, elle marcha dans la chambre avec agitation, confuse d’abord, puis, peu à peu remplie d’une sourde et profonde irritation.

Est-ce donc sa faute à elle si le crime de Ferdinand a perdu leur avenir ? Il faut pourtant pour vivre s’attacher à quelque chose, et puisqu’elle ne peut plus aimer M. Desfayes, pourquoi n’aimerait-elle pas Camille ?

Appuyant sur le marbre de la commode son beau bras souple et frémissant, elle penche son front et rêve. Une conseillère lui parle à l’oreille ; c’est Mathilde, dont elle se rappelle les opinions. Mathilde est traitée de folle,