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UN DIVORCE

— Fernand, que fais-tu ?

— J’écoute, balbutia-t-il d’une voix entrecoupée en se cachant le visage.

« L’enfant donc, ayant pris le grillon, le mit dans une boîte, où le pauvre grillon n’avait plus de soleil. Chante ! lui disait-il. Mais le grillon ne chantait plus. Il n’y a pas de joie pour le prisonnier. »

— Ah ! Fernand ! tu vois ! je te le disais ! Je ne te conterai plus ce conte-là.

L’enfant se frotta les yeux.

— C’est le soleil qui me fait pleurer, balbutia-t-il, en accompagnant cette excuse d’un sanglot de son cœur, gonflé par l’infortune du pauvre grillon.

« Alors, reprit Anna, l’enfant voyant cela reporta le grillon dans la prairie, et le grillon joyeux, ayant retrouvé son trou et sa liberté, recommença de chanter comme auparavant. »

— Est-ce bien vrai ? demanda Fernand, qui accompagna cette question d’un ardent regard. C’est bien vrai ? répéta-t-il avec doute, car il se rappelait un autre dénoûment, bien autrement lamentable, qui lui avait été raconté la première fois. Et il restait étonné, indécis, partagé entre le respect de la tradition et la joie de voir le grillon rendu au bonheur. Mais tante Anna lui assura si fort que c’était bien vrai, et que les choses s’étaient passées exactement comme cela, qu’enfin il accepta franchement cette heureuse issue, et repartit joyeux pour une excursion nouvelle, après avoir déchargé sa frêle poitrine de deux ou trois gros soupirs.

Claire le suivait d’un regard doux et charmé, quand tout à coup l’expression de son visage changea.

— Anna, dit-elle, qu’est-ce que cet homme vient faire ici ?