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UN DIVORCE

courait dans les allées, en poussant de petits cris, pareils aux chants des oiseaux.

— Vois comme il devient fort, et quelles fraîches couleurs il a ! disait Claire à sa sœur. La campagne lui fait du bien. Ah ! s’il en est ainsi, je ne suis plus aussi malheureuse.

— Tu dis toujours ce mot-là, observa Fernand, dont la figure s’attrista.

Mais les baisers de sa mère et de sa tante lui rendirent bientôt sa gaieté, et, grimpant sur les genoux d’Anna, d’un air câlin et de sa voix la plus douce :

— Tante Anna, raconte-moi encore le joli conte d’hier.

— Quel conte, mon chéri ? Celui du Grillon ? Non, il te ferait pleurer.

— Non, tante Anna, conte ; pas pleurer, dit-il en appuyant sa tête sur le sein de la jeune fille.

— « Il y avait un jour un enfant qui, en se promenant à petits pas dans les prés, entendit une chanson. Il écouta, la chanson venait de la terre. Et quand l’enfant s’approchait, la chanson ne chantait plus, mais s’il s’arrêtait longtemps, elle recommençait. Il se mit donc à poser les pieds l’un après l’autre, si doucement, si doucement, que l’herbe, à peine foulée, ne disait rien, et il arriva si près qu’il vit le petit chanteur. Il était tout noir. C’était le grillon des prés, au bord de son trou. Il chantait ! il chantait ! son gosier se vidait et s’enflait sans cesse, car il chantait de tout son cœur. »

Fernand écoutait avec une attention extrême ; à cet endroit, l’anxiété se peignit sur ses traits.

« Alors l’enfant, qui trouvait la chanson jolie, tandis que le pauvre grillon regardait ailleurs, jeta la main sur lui et le prit à travers l’herbe. Le chant cessa… »