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UN DIVORCE

pas de peine de vous avoir chez moi, au contraire, pourvu que les petits soient dociles et pas trop criards.

— Mais, demanda-t-elle d’une voix tremblante, qu’a-t-il dit enfin ?

— Peuh ! ce qu’il a dit ! t’attendais-tu à ce qu’il allait se mettre à genoux ? Ah ! bien oui ! Il m’a adressé des reproches sur ta conduite envers lui, m’a dit que tu lui faisais tous les jours des scènes, et que tu avais fini par lui rendre l’existence insupportable ; puis, il s’est plaint qu’on lui avait volé ses enfants, et il a demandé qu’on lui rendît l’aîné.

— Ah ! s’écria-t-elle ; et elle semblait près de s’évanouir.

— Ne te tourmente donc pas comme ça, reprit le père ; sur ma parole ! tu es trop nerveuse. J’ai donc répondu à ton mari : « S’il y a des torts pour tout le monde, c’est comme dans toutes les affaires. Mais je sais bien qui les a eus le premier. C’est-il raisonnable à un homme marié, comme vous, d’avoir une maîtresse ? Et surtout quand on vous a donné pour femme la plus jolie fille du canton ! » Il m’a nié que la Fonjallaz fût sa maîtresse ; je crois qu’il ment ; et pourtant, en y songeant, c’est une fine mouche, et elle aura eu bien soin de lui laisser quelque chose à désirer. Mais, d’un autre côté, ça n’est guère possible : elle lui a déjà coûté trop d’argent. Laisse-moi faire, je les pincerai, je te le jure. Alors je lui ai proposé un arrangement, afin de mettre toutes les bonnes façons de notre côté, et je lui ai dit que tu reviendrais avec lui, s’il voulait s’engager par serment à ne plus remettre les pieds au café Fonjallaz. Il a refusé, disant qu’il ne voulait pas s’avouer coupable, que tu n’avais qu’à avoir confiance en lui ; mais qu’il ne pouvait pas faire de soumission vis-à-vis de toi, puisque alors il