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UN DIVORCE

et ça l’empêchera de te taquiner. Car tu as joué un jeu, ma fillette, à te rendre la vie malheureuse. Il ne faut plus faire cela. Sois tranquille et douce, occupe-toi de tes enfants. L’essentiel est qu’il ne te ruine pas pour cette créature ; mais je te promets d’y veiller, moi.

Il insista pour emmener Anna, car la soirée s’avançait. Quand il embrassa Claire et qu’elle sanglota dans ses bras en s’écriant : Oh ! papa, que je suis malheureuse ! il fut touché, à peu près comme il l’était autrefois, quand, petite fille, elle pleurait de la perte d’un joujou.

Et du même ton dont alors il la consolait :

— Oui, je le sais bien, ma pauvre petite ; mais il faut se faire une raison. C’est un ennui qui passera, et peut-être plus tôt que tu ne le penses, si tu es sage. Après tout, il y en a de plus malheureuses que toi. Tu es mariée avec un des premiers de la ville, tu as de la fortune, tu ne manques de rien. Il faut t’occuper des petits, te distraire, et venir nous voir un peu plus souvent. Allons, ne pleure plus ; c’est des bêtises ; ce que je te recommande surtout, c’est de ne point te faire de mal, ni te tourmenter, puisque ça ne servirait de rien.