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UN DIVORCE

devait durer toujours ! Ils étaient bien encore liés l’un à l’autre, réunis dans le même lieu, mais leurs pensées maintenant, leurs cœurs, séparés, s’en allaient en sens contraire. Ils étaient mariés ensemble, et chacun d’eux en aimait un autre. Oh ! comment cela s’était-il fait ?

Ces pensées lui serrèrent horriblement le cœur. Elle ne voulut pas accepter cela. L’idéal du mariage, qu’elle regardait autrefois comme un dogme sacré, lui revint dans l’âme. Non, tout n’était pas, tout ne pouvait pas être fini entre eux. Il y avait là des enfants, dont ils étaient le père et la mère ; envers chacun de ces enfants ils étaient obligés tous deux, et quand ils se penchaient sur les berceaux tous les deux ensemble, leurs visages se rencontraient.

— Ferdinand ! s’écria-t-elle avec un accent du cœur, Ferdinand !

— Eh bien, dit-il avec étonnement et brusquerie, que me veux-tu ?

Elle ne répondit pas, n’osant dire ce qu’elle pensait ; lui, ne s’en enquit pas davantage, et, comme réveillé tout à coup, il fit quelques pas dans la chambre déjà sombre, cherchant son chapeau. Claire, allant au-devant de lui, lui prit la main :

— Tu vas t’en aller ? Pourquoi ne restes-tu pas ? Nous ne causons jamais ensemble. J’aurais souvent à te raconter mille jolies choses des enfants ; mais, comme tu n’es pas là, je l’oublie… et voilà, tu ne le sais pas.

Ferdinand fut surpris de cette insistance ; mais il haussa les épaules.

— Des contes de nourrice, dit-il. Ma chère, il faut que je sorte ; raconte cela à ta mère ou à ta sœur, quand tu les verras.

— Mais si tu tiens absolument à sortir, je pourrais