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UN DIVORCE

son propre compte, a interrogé les autres créanciers. Nous en riions tous au cercle hier soir.

— Tiens, c’est donc pour ça, s’écria madame Pascoud, que M. Grandvaux se plaint que sa famille lui donne tant de peine ! Je lui demandais l’autre jour des nouvelles de son neveu : eh ! mon Père : il s’est mis à soupirer comme si on lui avait fendu le cœur, et puis, en me secouant la main : « Ma chère, n’en parlons pas de celui-là ; il serait mon fils, ce qu’à Dieu ne plaise ! qu’il ne m’aurait pas donné plus de souci. » Comme il avait l’air si contrit, ça me fit une émotion, et je lui dis : « Que voulez-vous, monsieur Grandvaux, la vie est comme ça ! » Je crois même me rappeler qu’il avait une larme dans l’œil gauche.

— Vieux farceur ! dit Renaud en riant.

— Et cette heimathlose, en a-t-on depuis entendu parler ? demanda madame Boquillon.

— Pas du tout ! Étienne avait commencé quelques démarches pour ravoir l’enfant ; mais je crois qu’il n’a pas été bien loin, ou cela n’a pas réussi.

— Quant au père Grandvaux, reprit Renaud, je ne sais pas comment il prendra l’affaire de son gendre avec Monadier. Vous savez l’histoire des mines d’anthracite, Boquillon ? Desfayes a été mis dedans pour une grosse somme. On va liquider, et chacun en sera pour sa mise à peu près, car le terrain ne peut être exploité que dans quinze mille ans, et il n’y a rien à partager que le matériel d’exploitation Ferdinand en sera pour une vingtaine de mille francs. Toutefois n’en dites rien ; car, dès qu’il a vu que ça tournait mal, il a pris soin de cacher l’affaire, à cause de son beau-père. Il craint des reproches, et puis il a besoin de la dot de sa femme, que le vieil avare ne lâche que peu à peu.