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UN DIVORCE

bras de son cousin. Il ne la remercia point, tant il était ému. Elle baissait les yeux et sembla un moment occupée à vaincre son émotion ou sa timidité ; puis elle dit :

— Je ne puis pas te mépriser, car je t’aimerai toujours, mon cousin. Mon amitié est à toi pour la vie. Je te plains, je souffre avec toi. Je sais que tu as bon cœur, et que, quand même tu agis mal, ton intention était bonne. Il y a des gens prospères et considérés qui ne vivent que du mal des autres, et j’aime encore mieux que tu ne sois pas un de ceux-là. Tâche seulement de prendre courage, et puis… ne fais pas comme d’autres… Sois toujours bon et juste envers Maëdeli.

Autant les premières paroles de sa cousine avaient relevé le pauvre Étienne, autant ce dernier mot l’écrasa. Entendre ce nom prononcé par elle ! Maëdeli ! l’insurmontable obstacle qui le séparait d’Anna. Il le savait bien, hélas ! mais il l’oubliait toujours. Il n’eut pas le courage de répondre, et comme sa cousine, en achevant de parler, avait dégagé son bras du sien, il resta seul en arrière, puis alla s’asseoir sur un banc désert, la tête dans ses mains.

Il se trouvait si malheureux qu’il se mit à chercher avec rage, avec une grande puissance de désir, les moyens de conjurer le mauvais sort qui le poursuivait en toutes choses. Oh ! s’il pouvait réussir ! se réhabiliter un peu ! se distinguer, s’enrichir !

— À quoi diable pensez-vous ? dit une voix rude, en même temps qu’une main s’appuyait sur son épaule, et l’homme enjamba le banc et s’assit auprès d’Étienne.

— C’est vous, Monadier ! je pensais à vous, justement.

— Tiens ! pourquoi donc ?

— Je me demandais comment vous faites, vous et