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UN DIVORCE

plus voisine ; mais je crains un peu les quolibets, et puisque la voilà, vous devriez être assez bonne pour la garder.

— Allons, je le veux bien, répondit madame Fonjallaz à Étienne ; mais n’allez pas me demander souvent de pareils services. C’est qu’elle n’est pas vilaine du tout, malgré ses guenilles, cette petite-là ! Je parie que vous n’auriez pas ramassé un garçon avec autant de charité. Ah çà ! qu’en ferai-je demain ?

— Je vais parler d’elle à ma tante et à ces dames ; on pourrait la mettre en état de gagner sa vie, ce qui lui vaudrait mieux que d’être mendiante et de courir les chemins.

— Comme ça, décidément, vous vous lancez dans les bonnes œuvres ? je vois bien que vous allez payer vos dettes et ne plus boire que de l’eau. C’est-il pour ça qu’on ne vous voit guère depuis un mois ?

— Précisément.

— C’est très-bien ; mais vous devriez vous acquitter alors, dites-donc ?

— Sans doute, répondit le jeune homme avec embarras. Est-ce que ça vous inquiète ?

Elle fit une grimace qui ne disait pas non ; et, pour changer de sujet, il demanda :

— Desfayes est ici ?

— Oui, répondit-elle.

— Ah çà ! il est devenu tout à fait votre habitué ?

— Oh ! l’on ne voit plus que lui, mais c’est une bonne pratique, et je voudrais n’en avoir que de pareilles ; il règle son compte tous les soirs, et s’il vient chez nous, ce n’est pas qu’on lui ait refusé crédit ailleurs.

Après avoir décoché à bout portant cette phrase accompagnée d’un coup d’œil expressif, madame Fonjallaz