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UN DIVORCE

assise sur le tapis du foyer, s’appuyant sur une chauffeuse ; et la tête lui faisait tant de mal qu’elle eût voulu pouvoir ne plus penser afin de ne pas tant souffrir.

Le lendemain matin, en se réveillant assez tard, Ferdinand la trouva qui dormait ainsi, enivrée de larmes, pâle, les yeux gonflés, défigurée. Il devina quelque chose de ce qui s’était passé, et, la honte le rendant brutal, il l’éveilla durement, en lui ordonnant de se coucher et en s’emportant contre les ridicules simagrées des femmes. Claire obéit sans répondre un mot.

À l’heure du dîner, quand M. Desfayes rentra, il ne vit à table qu’un seul couvert, et Louise lui apprit que madame était malade, puisqu’elle n’était pas encore levée ; elle avait défendu qu’on la dérangeât. Ferdinand toutefois entra dans la chambre. Claire était immobile et avait les yeux fermés ; mais à un mouvement des paupières il crut voir qu’elle ne dormait pas.

— Claire ! dit-il.

Elle ne bougea point, et il se retira en fronçant les sourcils. Cependant il revint le soir d’assez bonne heure, et, trouvant sa femme alitée encore, il envoya chercher le médecin.

Claire avait une fièvre ardente et ressentait des douleurs générales dans tout le corps ; ses beaux yeux étaient cernés et un peu hagards. Cependant, après quelques remèdes, la fièvre baissa, et, dès le lendemain, le docteur déclara que ce n’était rien. N’était-ce rien ? Il y avait pourtant dans la voix, dans l’attitude, dans le regard de la jeune femme quelque chose qui dénotait l’ébranlement d’un coup fatal. Mais elle se ranima bientôt à vue d’œil, et de douces expressions revinrent sur son visage. La potion sans doute était bienfaisante, mais la main qui la versait était celle de Ferdinand, et pendant