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dresse de M. Joseph Cadron.

Marie prit le papier que lui tendait cet homme ; mais elle suivait ses pas, bien résolue à lui disputer les enfants, quand, devinant sa pensée, il lui dit avec compassion :

— Vos enfants sont déjà chez leur père, madame. Il a pu les emmener facilement, à l’insu de leur bonne, qui les quittait chaque jour. Calmez-vous ! n’oubliez pas que vous pouvez les venir voir toutes les fois qu’il vous plaira.

Sans répondre aux larmes et aux prières de la jeune femme autrement qu’en lui répétant ces derniers mots, il partit, la laissant désespérée.

— J’étais déjà une mauvaise épouse, s’écriait-elle en se tordant les mains ; me voilà une mauvaise mère. Une mauvaise mère !…

Et elle parcourait la chambre en appelant ses enfants.

Vingt fois, elle faillit partir pour les aller voir ; mais le cœur lui manquait à l’idée de se trouver en présence de Joseph. S’il eût été brutal et colère, elle l’aurait bravé sans peur ; mais la vraie dignité de cet homme, sa justice et sa bonté l’écrasaient de honte. Quant à sacrifier son amant, elle ne le pouvait ; les liens qui l’attachaient à lui subsistaient encore dans toute leur force, avec les illusions qui les avaient formés. Quelque coupable que fût cet engagement, il avait de sacré pour Marie tout ce qu’elle y avait mis de croyances et reçu d’amour. Elle se croyait nécessaire à Charles.