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de la tranchée, ou du « trou individuel » est non pas de révéler le geste du combattant, mais de le dissimuler à la vue. C’est expressément pour cela que c’est fait. La mine le cache mieux encore. Ce premier trait de l’action nouvelle est donc défavorable à la peinture.

Un second est l’importance de la mitrailleuse. Mais le mitrailleur lui-même est caché, terré, dans ce qu’on appelle son « nid », et son geste se déploie fort peu. De même, le servant du « crapouillot » ou lance-bombes. Seul, de toutes les actions nouvelles dictées par la nouvelle tactique, le combat à la grenade offre un thème au peintre. Seul, il dicte un grand geste, un geste en extension et même deux : le geste de la main gauche qui vise et celui du bras droit qui lance, avec toute la suite d’attitudes giratoires que ces mouvements déterminent. Certes, ce n’est pas le Discobole : pourtant, s’il était dégagé de la lourde carapace du vêtement, il offrirait un beau motif, même au sculpteur. En tout cas, l’action du « grenadier », comme celle du « nettoyeur de tranchées », la rencontre fortuite ou voulue de l’ennemi dans les boyaux, la dispute d’un entonnoir à la baïonnette, le corps à corps, en un mot, ou le contact : — voilà qui parle aux yeux et qui est significatif de la lutte.

En effet, le corps à corps a été à peu près le seul thème du combat antique figuré par la sculpture grecque et l’un des plus fréquents de la peinture de batailles jusqu’au xixe siècle. Mais on pouvait