Page:L'Art pendant la guerre 1914-1918.djvu/109

Cette page a été validée par deux contributeurs.

celles que les Vandales ou les Huns ont pu faire après eux, des ruines comme celles de Dinant en 1465, en voici.

Ce qui frappe, d’abord, dans les aquarelles de la guerre, de M. Duvent, de M. Flameng, de M. Vignal, c’est leur allure de procès-verbal. On sent fort bien que l’artiste n’a nullement cherché à se « monter la tête ». Il a cherché, au contraire, — devant un spectacle d’horreur qu’il ne pensait voir de sa vie, — à garder tout son sang-froid, à dompter ses nerfs, à fermer, pour ainsi dire, les pores de sa sensibilité. Quand Gustave Doré, quand Victor Hugo, dans leurs étonnants dessins, fabriquent des « ruines », ils mettent l’accent sur l’horreur et sur la désolation. Ici, l’accent n’est pas mis, la voix n’est pas enflée : elle raconte, d’un ton égal, la lamentable histoire. C’est dans les temps de calme et de bonheur qu’on aiguise ses facultés de sentir, c’est-à-dire de souffrir. De même, c’est quand le « motif » est banal, qu’on se livre à des tentatives de technique hasardeuse, pour le renouveler. Quand le drame est là, pesant sur toutes nos fibres à les briser, on chercherait plutôt le secret de l’insensibilité pour « tenir ». Quand le « motif» d’horreur se présente dans la vie, il ne s’agit pas de l’accentuer, ni de l’enrichir d’une technique imprévue. Il suffit de le rendre.