Page:L'œil ouvert ! - Bourassa et l'Anti-Laurierisme, 1911.djvu/48

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

En réponse, j’ai l’honneur de vous dire que le comté de Richelieu m’a confié le mandat de le représenter à la Chambre des Communes, et que sur la question navale, comme sur toutes les autres, j’agirai au meilleur de ma connaissance, de mon jugement et de ma conscience.

ADÉLARD LANCTÔT.

Est ce que M. Lanctôt ne prend pas, dans cette lettre, précisément la position que M. Bourassa recommandait à Joliette ?

Alors, vous allez croire que M. Bourassa a félicité M. Lanctôt d’avoir été aussi courageux pour tenir sa ligne de conduite propre et de rappeler ses électeurs à la saine notion des choses ?

Pas du tout ! M. Bourassa a dit :

« Ici encore je m’adresse aux rouges et je leur dis : Combien de fois avons-nous reproché aux bleus DE MÉPRISER LE PEUPLE ? Les députés libéraux suivent leur exemple. Châtions-les de la même manière. »

Voilà, M. Bourassa demande aux électeurs de Sorel de châtier leur député pour avoir fait ce qu’à Joliette lui-même, M. Bourassa, recommandait à tous les députés de faire.

De Joliette à Sorel, M. Bourassa a changé de principes.

Vous direz, sans doute, qu’il en a, pour cela, beaucoup de rechange.

Et c’est très vrai. Il en a tant et il en change si souvent que, parfois, il s’embrouille et ne laisse pas aux gens le temps d’oublier les uns avant de leur prêcher les autres.



MONK — : Attention ! Baptiste, ne vois-tu pas, au-dessus de ta tête, cette épée de Damoclès qui ne tient plus que par un fil !
BAPTISTE — : T’appelles ça un fil ces deux grosses chaînes-là.


CONTRADICTIONS.


SIR WILFRID LAURIER JUGÉ PAR M. BOURASSA.

FAIBLE OU FORT.


Lorsque l’on est obligé de discuter avec M. Bourassa, il y a deux précautions préliminaires obligatoires. C’est, d’abord, de trier ce qu’il peut y avoir de cohérent et de susceptible d’analyse au milieu des invectives qui forment le fonds de ses articles. Ensuite, après avoir débarrassé ces bribes d’idées du fumier où ils les a serties — chacun s’entoure de ce qui lui plait — c’est de revoir aux sources officielles toutes ses citations, afin d’en séparer le vrai du faux ; de rendre aux bribes de vrais textes, qui lui échappent, leur signification réelle d’après le contexte ; et de situer les faits dans le cadre qui leur appartient.

Deux des articles qu’il a consacrés à Sir Wilfrid Laurier et à sa mission à Londres, dans le « Devoir », traités de cette manière, ne laissent plus guère à la critique que des affirmations gratuites, et de fausses présentations de faits, dont la portée est complètement dénaturée.


Pour M. Bourassa, Sir Wilfrid Laurier est, d’abord, un homme énergique.

« Rien n’est plus faux que la légende de la faiblesse du premier ministre, de son penchant à se laisser dominer par son entourage. Mais ceux qui ont cru à la légende et qui ont voulu, comme M. Tarte, M. Blair ou M. Sifton, en profiter pour prendre trop de place, ont payé de leur tête leur audace ou leur opiniâtreté. » ( « Le Devoir », 11 mai.)

Cette appréciation lui servait d’entrée en matière pour expliquer, à sa manière, le canard de la rupture Fielding, auquel M. Bourassa feignait de croire.

Mais, le 12 mai, il fallait détruire auprès des fidèles la notion qui se répandait, que Sir Wilfrid Laurier allait à Londres pour déjouer les projets de fédération impériale qui s’agitaient autour de la conférence. Changement de ton. Sir Wilfrid Laurier n’est plus qu’une bonne pâte que chacun peut pétrir à son gré :

« Le premier ministre est un habile homme et un merveilleux négociateur ; mais il n’a ni la NETTETÉ DE PENSÉE, ni la FORCE DE CONVICTION, ni la VIGUEUR DE CARACTÈRE qu’il faudrait pour tenir tête aux hommes puissants qui dirigent le mouvement impérialiste. IL EST TOTALEMENT INCAPABLE DE RÉSISTER AUX MOYENS DE CONQUÊTE ET D’INTIMIDATION DONT LES IMPÉRIALISTES DISPOSENT — ( « Le Devoir », 12 mai.)

Voilà, en passant, une contradiction qui méritait d’être signalée.


LA VRAIE INDÉPENDANCE.


M. Bourassa crie constamment à l’Indépendance ; il célèbre les vertus de l’Indépendance, mais son premier soin est de créer un parti nouveau et d’y enrégimenter autant de monde qu’il peut sous la discipline la plus sévère, quitte à tyranniser, vilipender et dénoncer ceux qui ne veulent passer sous la férule.

En voilà bien de l’indépendance.

Il est bien permis à l’a population ouvrière de songer à un troisième parti, parce qu’elle a des intérêts de classe, de collectivité à faire valoir. Ni les conservateurs, ni les libéraux ne peuvent se rallier d’emblée à toutes les théories ou réclamations ouvrières, bien qu’ils éprouvent de fortes sympathies pour elles, puisque le gouvernement est