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en arrière, fit un faux pas et tomba par terre. On le releva. Au même instant, on emportait Lisaveta Ivanovna évanouie.

Cet incident troubla pendant quelques minutes la solennité de la cérémonie funèbre. Un murmure sourd s’éleva de la foule des invités, et un chambellan maigre, proche parent de la mortel souffla à l’oreille de l’Anglais, son voisin, que le jeune officier était le fils naturel de la comtesse, a quoi l’Anglais répondit froidement : « Oh ! »

Toute la journée, Hermann fut comme déséquilibré. En dînant dans une, auberge isolée, il but beaucoup, contre son habitude, dans l’espoir d’étouffer son agitation intérieure. Mais le vin ne fit qu’enflammer davantage son imagination. De retour chez lui, il se jeta tout habillé sur son lit et s’endormit profondément.

Pendant la nuit, il s’éveilla : la lune éclairait sa chambre. Il consulta sa montre ; il était trois heures moins le quart. Il lui fut impossible de se rendormir ; il se mit sur son séant et repassa dans son esprit les obsèques de la vieille comtesse.

À ce moment, quelqu’un regarda chez lui par la fenêtre et disparut presque aussitôt. Hermann n’y fit pas attention. Une minute après, il entendit ouvrir la porte du vestibule. Il crut que c’était son ordonnance, qui rentrait d’une promenade nocturne, ivre comme d’habitude. Mais il entendit un pas inconnu : quelqu’un marchait doucement, en faisant claquer ses pantoufles.

La porte s’ouvrit : une femme en robe blanche entra. Hermann la prit pour sa vieille nourrice, et s’étonna de la voir arriver à une heure pareille. Mais la femme blanche, se glis-