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les sciences et apprendre un métier. Chacun le reconnaîtra ; mais comment agissons-nous ? Dès que l'enfant a dix ans, ou même neuf ans, nous l'envoyons pousser un wagonnet au fond d'une mine, ou rattacher, avec une prestesse simiesque, les deux extrémités des fils rompus des métiers mécaniques du tisserand. Sitôt que la fillette atteint l'âge de 13 ou 14 ans, on l'envoie, — un enfant encore, — travailler comme « femme » à un métier à tisser, ou cuire dans l'atmosphère surchauffée et empoisonnée de l'atelier d'apprêt dans une manufacture de cotonnades, ou bien encore s'intoxiquer dans les chambres meurtrières d'une poterie. Quant aux enfants qui ont le bonheur relativement rare de recevoir un peu plus d'instruction, nous anéantissons leur intelligence par un surmenage inutile, nous leur enlevons consciemment toute possibilité de devenir eux-mêmes des producteurs ; et avec un système d'éducation dont le but est le « profit », et le moyen — la « spécialisation », nous tuons de surtravail les professeurs femmes qui prennent au sérieux leurs devoirs professionnels. Sous quels flots de souffrances inutiles chacun des pays « civilisés » de ce monde n'est-il pas submergé !

Quand nous jetons un regard rétrospectif sur les siècles écoulés et que nous y constatons les mêmes souffrances, nous pouvons nous dire qu'alors, peut-être, elles étaient inévitables, à cause