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C’est en effet ce qui arriva. Cette étroite conception de la vie, qui consistait à penser que les profits sont les seuls mobiles de la société humaine, et cette croyance obstinée que ce qui existe aujourd’hui durera toujours, se trouvèrent en désaccord avec les tendances de la vie humaine. La vie prit une autre direction. Personne ne niera sans doute que, grâce à la spécialisation, la production peut atteindre un très grand développement ; mais précisément à mesure que le travail demandé à l’ouvrier dans l’organisation industrielle actuelle devient plus simple et d’un apprentissage plus facile, et par suite plus monotone et plus ennuyeux, — le désir de varier son travail pour exercer toutes ses facultés se fait d’autant plus pressant chez l’individu.

L’humanité s’aperçoit qu’il n’y a aucun avantage pour la communauté à river pour toute sa vie un être humain à un endroit déterminé d’un atelier ou d’une mine, aucun bénéfice à le priver d’un travail qui le mettrait en rapport direct avec la nature, ferait de lui une partie consciente du grand tout, lui permettrait de participer aux jouissances suprêmes de la science et de l’art, du travail libre et de la création. On commence à comprendre qu’alors seulement il serait capable de donner à la société tout ce qu’il peut lui donner.

Les nations aussi refusent de se spécialiser. Chaque peuple est un composé de goûts et d’in-