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encore plus expéditives, et la déportation fut appliquée aussi aux prêtres constitutionnels, assermentés, s’ils étaient accusés d’incivisme par six citoyens de leur canton. C’est qu’on se persuadait de plus en plus que les jureurs étaient souvent tout aussi dangereux que les non-jureurs ou papistes.

Les premières tentatives de « déchristianisation » furent faites à Abbeville et à Nevers[1]. Le conventionnel Pouché qui se trouvait en mission à Nevers, et qui agissait sans doute de concert et peut-être sous l’influence de Chaumette, qu’il rencontra dans cette ville, déclarait, le 26 septembre 1793, la guerre « aux cultes superstitieux et hypocrites », pour leur substituer « celui de la république et la morale naturelle[2] ». Quelques jours après l’acceptation du nouveau calendrier il prit (le 10 octobre), un nouvel arrêté, d’après lequel les cérémonies des cultes ne pourraient être exercées qu’à l’intérieur de leurs temples respectifs ; toutes « les enseignes religieuses qui se trouvent sur les routes », etc., seraient anéanties, les prêtres n’oseraient plus paraître dans leurs costumes, ailleurs que dans leurs temples, et enfin les enterrements se feraient sans aucune cérémonie religieuse, dans des champs plantés d’arbres « sous l’ombre desquels s’élèvera une statue représentant le Sommeil.

  1. Dans tout cet exposé je suis de près l’excellente monographie du professeur Aulard, Le culte de la Raison et le culte de l’Être suprême, 2e édit., Paris, 1904. Un abrégé de cet ouvrage, se trouve aussi dans son Histoire politique, 2e édit., pp. 469 et suivantes.
  2. Il lança aussi un arrêté en vertu duquel « tout ministre du culte ou prêtre pensionné par la nation serait tenu de se marier, ou d’adopter un enfant, ou de nourrir un vieillard indigent, sous peine d’être déchu de ces fonctions et pensions ». (Aulard, Culte de la raison, p. 27).