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de s’associer avec son semblable, - l’amour de la société pour la société même et pour la « joie de vivre », sont des faits qui commencent seulement à recevoir des zoologistes l’attention qu’ils méritent[1]. Nous savons à présent que tous les animaux, depuis les fourmis jusqu’aux oiseaux et aux mammifères les plus élevés, aiment jouer, lutter, courir l’un après l’autre, essayer de s’attraper l’un l’autre, se taquiner, etc... Et tandis que beaucoup de jeux sont pour ainsi dire une école où les jeunes apprennent la manière de se conduire dans la vie, d’autres, outre leurs buts utilitaires, sont, comme les danses et les chants, de simples manifestations d’un excès de forces. C’est la « joie de vivre », le désir de communiquer d’une façon quelconque avec d’autres individus de la même espèce ou même d’une autre espèce ; ce sont des manifestations de la sociabilité, au sens propre du mot, trait distinctif de tout le règne animal[2]. Que le sentiment soit venu de la crainte éprouvée à l’approche d’un oiseau de proie, ou d’un « accès de joie », qui éclate quand les animaux sont en bonne santé et particulièrement quand

    de Huxley la paraphrase suivante d’une phrase bien connue de Rousseau : « Les premiers hommes qui substituèrent la paix mutuelle à la guerre mutuelle — quel que soit le motif qui les força à faire ce progrès — créèrent la société. » (Nineteenth Century, février 1888, p. 165.) — La société n’a pas été créée par l’homme, elle est antérieure à l’homme.

  1. Des monographies telles que le chapitre, « La musique et la danse dans la nature » dans le livre de Hudson : Naturalist on the La Plata et l’ouvrage de Carl Gross : Les jeux des animaux ont déjà jeté une vive lumière sur cet instinct qui est absolument universel dans la nature.
  2. Non seulement de nombreuses espèces d’oiseaux ont l’habitude de s’assembler (souvent à un endroit fixe) pour s’amuser et pour danser, mais d’après les observations de W. H. Hudson tous les mammifères et les oiseaux (« il n’y a probablement pas d’exception ») se livrent fréquemment à des séries de récréations, chants, danses et exercices, plus ou moins organisés et accompagnés de bruits et de chants (p. 264).