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qu’elles sont le trait d’union qui nous amène aux sociétés des hommes primitifs.

Il est à peine nécessaire de dire que ces mammifères qui se trouvent au sommet de l’échelle du monde animal et ressemblent le plus à l’homme par leur structure et leur intelligence, sont éminemment sociables. Certes il faut nous attendre à rencontrer toutes sortes de variétés de caractères et d’habitudes dans cette grande division du règne animal qui comprend des centaines d’espèces. Mais, tout considéré, on peut dire que la sociabilité, l’action en commun, la protection mutuelle et un grand développement des sentiments qui sont un résultat naturel de la vie sociale, caractérisent la plupart des espèces de singes : chez les plus petites espèces comme chez les plus grandes la sociabilité est une règle à laquelle nous ne connaissons que peu d’exceptions. Les singes nocturnes préfèrent la vie isolée ; les capucins (Cebus capucinus), les monos et les singes hurleurs ne vivent qu’en très petites familles ; A. R. Wallace n’a jamais vu les orangs-outangs que solitaires ou en très petits groupes de trois ou quatre individus ; les gorilles ne semblent jamais se réunir en bandes. Mais toutes les autres espèces de la tribu des singes — les chimpanzés, les sajous, les sakis, les mandrilles, les babouins, etc. — sont sociables au plus haut degré. Ils vivent en grandes bandes et se joignent même à d’autres espèces que la leur. La plupart d’entre eux deviennent tout à fait malheureux quand ils sont solitaires. Les cris de détresse de l’un d’eux font accourir immédiatement la bande entière, et ils repoussent avec hardiesse les attaques de la plupart des carnivores et des oiseaux de proie. Les aigles eux-mêmes n’osent pas les attaquer. C’est toujours par bandes qu’ils pillent nos champs, les vieux prenant soin de la sûreté de la communauté. Les petits ti-tis dont les douces figures