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nous nous rappelons que les bisons de l’Amérique du Nord montraient autrefois les mêmes qualités d’union. On les voyait paître en grand nombre dans les plaines, mais ces grandes assemblées étaient composées d’une infinité de petits groupes qui ne se mêlaient jamais. Et cependant quand la nécessité s’en faisait sentir, tous les groupes, quoique disséminés sur un immense territoire, se réunissaient comme je l’ai mentionné précédemment, et formaient ces immenses colonnes composées de centaines de mille individus.

Je devrais aussi dire quelques mots au moins des « familles composées » des éléphants, de leur attachement mutuel, de la façon avisée dont ils posent leurs sentinelles, et des sentiments de sympathie développés par une telle vie d’étroit soutien mutuel[1]. Je pourrais mentionner les sentiments sociables des sangliers sauvages, et trouver un mot de louange pour leurs facultés d’association en cas d’attaque par une bête de proie[2]. L’hippopotame et le rhinocéros pourraient aussi avoir leur place dans un ouvrage consacré à la sociabilité chez les animaux. Plusieurs pages saisissantes pourraient décrire l’attachement mutuel et la sociabilité des phoques et des morses ; et enfin, on pourrait mentionner les sentiments tout à fait excellents qui existent parmi les cétacés sociables. Mais il faut dire encore quelques mots des sociétés de singes, qui possèdent un intérêt d’autant plus grand

  1. Suivant Samuel W. Baker, les éléphants s’unissent en groupes plus nombreux que les « familles composées ». « J’ai fréquemment observé, écrit-il, dans la partie de Ceylan, connue sous le nom de Région du Parc, des traces d’éléphants en grand nombre provenant évidemment de troupeaux considérables qui s’étaient unis pour opérer une retraite générale d’un territoire qu’ils considéraient comme dangereux », (Wild Beasts and their Ways, vol. I, p. 102.)
  2. Les porcs attaqués par les loups font de même (Hudson, loc. cit.).