Page:Kropotkine - L Entraide un facteur de l evolution, traduction Breal, Hachette 1906.djvu/284

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la Barguillière) est encore en vigueur un antique usage appelé l’emprount (l’emprunt) : quand, dans une métairie on a besoin de beaucoup de bras pour faire vivement un travail, par exemple quand il s’agit de ramasser des pommes de terre, de couper les foins, la jeunesse des environs est convoquée ; garçons et filles accourent, font la besogne en riant, avec entrain et gratuitement ; puis, le soir, après un joyeux repas, on danse.

Dans ces mêmes communes, quand une jeune fille se marie, les jeunes filles du voisinage viennent gratuitement aider la fiancée à faire son trousseau, Dans plusieurs communes du canton d’Ax (Ariège), les femmes et filles filent encore beaucoup. Quand il s’agit de dévider le fil dans une famille, grande réunion des amis de la famille pour aider gratuitement à faire l’opération en une seule soirée qui se termine par un repas. Dans bien des communes de l’Ariège et autres départements du Sud-Ouest, quand il s’agit de dépouiller de leurs enveloppes les épis de maïs, l’opération se fait gratuitement à l’aide de voisins qu’on régale de châtaignes et de vin. Et après boire, la jeunesse danse.

Dans d’autres communes, pour faire de l’huile de noix, les jeunes gens, garçons et filles, se réunissent le soir, en hiver, chez le propriétaire qui veut faire de l’huile ; les uns cassent, les autres épluchent les noix, gratuitement. Les jeunes filles vont broyer le chanvre dans les maisons, gratuitement, le soir ; et les jeunes gens arrivent, dans le courant de la soirée, pour chanter et danser. Dans la commune de L., quand il s’agit de transporter les gerbes, chaque famille a recours à tout ce qu’il y a de jeune et de vigoureux pour faire ce pénible travail. Et ces rudes journées sont transformées en jours de fête, car chacun tient à honneur de servir de bons repas aux travailleurs. Aucune autre rémunération n’est donnée aux ouvriers : chacun fait le travail pour les autres, à charge de revanche. Travail pour travail[1].

Dans la commune de S., les pâturages communaux

  1. Les Géorgiens font encore mieux au Caucase : le repas étant