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mirent à la tête de la résistance pour la protection des « immunités » des villes et la défense de leurs libertés, que beaucoup d’entre eux furent, après leur mort, considérés comme des saints et devinrent les patrons de différentes cités : saint Uthelred de Winchester, saint Ulrik d’Augsbourg, saint Wolfgang de Ratisbonne, saint Héribert de Cologne, saint Adalbert de Prague et ainsi de suite. Beaucoup d’abbés et de moines devinrent aussi des saints patrons de cités, pour avoir soutenu le parti des droits du peuple[1] ; Avec ces nouveaux défenseurs — laïques ou cléricaux — les citoyens conquirent l’entière autonomie juridique et administrative pour leurs assemblées populaires[2].

Tout le progrès de libération s’accomplit par une suite imperceptible d’actes de dévouement à la chose commune, venant d’hommes du peuple — de héros inconnus dont les noms mêmes n’ont pas été conservés par l’histoire. Le merveilleux mouvement de la Trêve de Dieu (treuga Dei), par lequel les masses populaires s’efforcèrent de mettre une limite aux interminables dissensions de familles nobles, sortit des jeunes cités, dont les citoyens et les évêques s’efforcèrent d’étendre aux nobles la paix qu’ils avaient établie à l’intérieur

  1. Ferrari, Histoire des révolutions d’Italie, I, 257 ; Kallsen, Die deutschen Städte im Mittelalter, vol. I (Halle, 1891.
  2. Voyez les excellentes remarques de Mr. G. L. Gomme touchant les assemblées du peuple à Londres (The Literature of Local Institutions, Londres, 1886, p. 76). Il faut cependant remarquer que dans les cités royales, les assemblées du peuple n’obtinrent jamais l’indépendance qu’elles eurent ailleurs. Il est même certain que les villes de Moscou et de Paris furent choisie par les rois et par l’Église comme les berceaux de la future autorité royale dans l’État ; parce que ces villes ne possédaient pas la tradition d’assemblées populaires accoutumées à agir souverainement en toute chose.