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que celle de la djemmâa, ou assemblée des communautés villageoises. Tous les hommes d’âge y prennent part, en plein air, ou dans un bâtiment spécial garni de sièges de pierre, et les décisions de la djemmâa sont prises à l’unanimité : c’est-à-dire que les discussions continuent jusqu’à ce que tous ceux qui sont présents acceptent ou admettent de se soumettre à quelque décision. Comme il n’y a point d’« autorités » dans une commune villageoise pour imposer une décision, ce système a été pratiqué par l’humanité partout où il y a eu des communes de village, et il est encore en vigueur là où les communes continuent d’exister, c’est-à-dire parmi plusieurs centaines de millions d’hommes. La djemmâa nomme le pouvoir exécutif — l’ancien, le scribe et le trésorier ; elle fixe les impôts et dirige la répartition des terres communes, ainsi que toute espèce de travaux d’utilité publique. Beaucoup de travaux sont exécutés en commun : les routes, les mosquées, les fontaines, les canaux d’irrigation, les tours élevées pour se protéger des pillards, les clôtures, etc., sont faits par la commune ; tandis que les grandes routes, les grandes mosquées et les grandes places de marché sont l’œuvre de la tribu. Bien des vestiges de la culture en commun continuent d’exister, et les maisons sont encore bâties par ou avec l’aide de tous les hommes et de toutes les femmes du village. Les « aides » sont d’un usage très fréquent, et on les convoque pour la culture des champs, pour la moisson, etc. Quant au travail professionnel, chaque commune a son forgeron, qui jouit de sa part de terre communale et travaille pour la commune ; quand la saison du labourage approche, cet ouvrier visite chaque maison et répare les outils et les charrues, sans attendre aucun payement. La fabrication de nouvelles charrues est considérée comme une œuvre pieuse qu’on ne peut