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resta un co-propriétaire des terrains incultes, des forêts et des pâturages. De plus, nous voyons continuellement, en particulier dans l’histoire de la Russie, que lorsque quelques familles, agissant séparément, s’emparaient de terres appartenant à des tribus considérées comme étrangères, ces familles ne tardaient pas à s’unir et à constituer une commune villageoise, qui, à la troisième ou quatrième génération, commençait à professer une communauté d’origine.

Toute une série d’institutions en partie héritées de la période des clans, sont nées de cette base fondamentale, la propriété de la terre en commun, durant la longue suite de siècles qu’il fallut pour amener les barbares sous la domination d’États organisés selon le système romain ou byzantin. La commune du village n’était pas seulement une union pour garantir à chacun une part équitable de la terre commune, elle représentait aussi une union pour la culture de la terre en commun, pour le soutien mutuel sous toutes les formes possibles, pour la protection contre la violence et pour un développement ultérieur du savoir, des conceptions morales ainsi que des liens nationaux. Aucun changement dans les mœurs touchant à la justice, à la défense armée, à l’éducation ou aux rapports économiques ne pouvait être fait sans avoir été décidé par l’assemblée du village, de la tribu, ou de la confédération. La commune, étant une continuation de la gens, hérita de toutes ses fonctions. C’était une universitas, un mir — un monde en soi[1].

La chasse en commun, la pêche en commun et la culture en commun des potagers ou des plantations d’arbres fruitiers avait été la règle pour les anciennes gentes. L’agriculture en commun devint la règle dans

  1. Mir = univers, monde.