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l’ankus du roi

on dirait les marbrures dans la cloche d’un lis.

— Il lui faut de l’eau. Une peau neuve n’atteint jamais tout son éclat avant le premier bain. Allons nous baigner.

— Je vais te porter, dit Mowgli.

Et il se baissa, en riant, comme pour soulever le grand corps de Kaa par le milieu, juste à l’endroit où le cylindre offrait le plus d’épaisseur. C’était comme si un homme essayait de soulever un conduit à eau de deux pieds de diamètre ; et Kaa restait immobile, pouffant de gaieté silencieuse. Puis, ils commencèrent leur habituelle partie du soir : le Garçon, dans la fleur de sa jeune force, et le Python, dans la somptueuse nouveauté de sa parure, face à face pour un match de lutte, épreuve d’adresse et de vigueur. Sans doute Kaa aurait pu broyer une douzaine de Mowglis s’il s’était laissé aller ; mais il jouait avec précaution, et ne donnait pas le dixième de sa puissance. Dès que Mowgli avait eu la force de supporter quelques façons un peu rudes, Kaa lui avait enseigné ce jeu, qui assouplissait les membres du garçon comme nul autre. Parfois Mowgli, garrotté jusqu’au menton par les anneaux mobiles de Kaa, s’efforçait de dégager un bras pour saisir le serpent à la gorge. Alors Kaa cédait mollement, et