Page:Kempis - L Imitation de Jesus Christ, traduction Lammenais, edition Pages, 1890.djvu/259

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

répand point au dehors, et rougit de paraître devant les hommes.

12. La nature se réjouit d’avoir quelque consolation extérieure qui flatte le penchant des sens.

La grâce ne cherche de consolations qu’en Dieu seul : et s’élevant au-dessus des choses visibles, elle met toutes ses délices dans le souverain bien.

13. La nature agit en tout pour le gain et pour son avantage propre ; elle ne sait rien faire gratuitement ; mais, en obligeant, elle espère obtenir quelque chose d’égal ou de meilleur, des faveurs ou des louanges ; et elle veut qu’on tienne pour beaucoup tout ce qu’elle fait et tout ce qu’elle donne.

La grâce ne veut rien de temporel ; elle ne demande d’autre récompense que Dieu seul, et ne désire des choses du temps, même les plus nécessaires, que ce qui peut lui servir pour acquérir les biens éternels.

14. La nature se complaît dans le grand nombre des amis et des parents ; elle se glorifie d’un rang élevé, d’une naissance illustre ; elle sourit aux puissants, flatte les riches et applaudit à ceux qui lui ressemblent.

La grâce aime ses ennemis mêmes, et ne s’enorgueillit point du nombre de ses amis ; elle ne compte pour rien la noblesse et les ancêtres, à moins qu’ils ne se soient distingués par la vertu ; elle favorise plutôt le pauvre que le riche, compatit plus à l’innocent qu’au puissant, recherche l’homme vrai, fuit le menteur, et ne cesse d’exhorter les bons à s’efforcer de devenir meilleurs[1], afin de se rendre semblables au Fils de Dieu par leurs vertus.

15. La nature est prompte à se plaindre de ce qui lui manque et de ce qui la blesse.

La grâce supporte avec constance la pauvreté.

16. La nature rapporte tout à elle-même, combat, discute pour ses intérêts.

  1. I Cor. xi, 31.